L’étude de l’organisation de l’élevage canin montre qu’il
existe
souvent un déséquilibre important entre les mâles et les
femelles.
On constate en effet que, le plus souvent, l’éleveur ne
choisit un
étalon que lorsqu’il souhaite faire reproduire sa femelle.
En fait, il
n’existe pas vraiment de sélection sur les femelles, et les
propriétaires d’étalons n’ont réellement qu’un choix
limité :
•
ils peuvent refuser
une demande de saillie s’ils le souhaitent, mais ne peuvent que proposer les services de leur mâle aux
propriétaires de femelles ;
•
en aucun cas, ils ne
peuvent seul décider de mettre leur chien à la reproduction s’ils ne sont pas eux-mêmes propriétaires
de femelles en âge de reproduire.
Le choix des reproducteurs, et en particulier celui des
étalons, constitue donc une étape essentielle de l’amélioration
génétique ;
il repose sur le respect de règles simples, indépendamment
des critères de sélections retenus :
•
il ne suffit pas de
se contenter du meilleur chien de l’exposition ;
•
il est indispensable
d’observer l’ensemble de la descendance du candidat retenu, lorsqu’elle existe déjà ;
•
il convient enfin d’accorder
plus d’importance aux collatéraux qu’aux ascendants.
Enfin,
il est indispensable de définir convenablement les
critères de sélection qui serviront au choix des futurs reproducteurs.
Problèmes liés au choix du meilleur chien de l’exposition
L’étude du nombre de portées produites par un étalon en
fonction
des résultats qu’il a obtenus en exposition montre qu’il
existe une
relation étroite entre ces deux paramètres. Cela n’a rien
d’étonnant si l’on considère qu’un candidat doit d’abord
être
régulièrement présenté en expositions pour que les
éleveurs
puissent se faire une idée de sa qualité individuelle, et qu’un
chien qui ne présente pas les qualités suffisantes pour
satisfaire
aux critères définis par le standard ne peut raisonnablement
pas
améliorer la race à laquelle il appartient.
Cependant, il apparaît clairement que la majorité, sinon la
quasi
totalité des demandes de saillies d’une année vont aux
chiens qui
ont su retenir l’attention de leurs juges lors de l’Exposition
nationale d’élevage ou lors du Championnat : celui qui
clôture l’une de ces expositions avec un « Best
in show » est assuré d’un carnet de rendez-vous bien rempli. Nous pourrions d’ailleurs
faire la même constatation quel que soit le pays considéré.
En fait, quand il ne s’agit pas de la recherche de la
solution la plus simpliste, la sélection du candidat le plus primé
correspond, bien souvent, à des critères qui sont plutôt de nature
économique :
l’éleveur recherche l’individu le plus titré parce qu’il
sait qu’il pourra vendre plus facilement l’ensemble de la portée, et
pas nécessairement parce qu’il s’agit du candidat qui
correspond le plus à des critères d’amélioration génétique qu’il
aurait pu se donner en fonction de la femelle qu’il désire faire
reproduire.
Il s’agit là d’une attitude relativement dommageable pour
l’ensemble des races, tant d’un point de vue du progrès
génétique immédiat que des restrictions de la variabilité génétique
intraraciale induites à long terme :
•
au delà d’un
certain nombre de portées, un reproducteur ne contribue plus à l’amélioration génétique immédiate de
l’effectif au sein duquel il reproduit ;
•
bien au contraire,
son utilisation intensive limite, à plus ou moins long terme, les possibilités de choix des futurs
sélectionneurs s’il ne veulent pas voir la consanguinité
moyenne de la population considérée augmenter au delà de
certaines valeurs.
L’utilisation intensive de certains
reproducteurs constitue, indépendamment d’ailleurs de leurs qualités intrinsèques,
un problème essentiel en matière de sélection, puisqu’il
devient difficile pour des éleveurs soucieux de renouveler les
origines de leur cheptel de trouver des lignées pour lesquelles ils ne
retrouvent pas certains ancêtres communs, déjà trop
fréquents dans les arbres généalogiques des individus qu’ils ont
retenus.
Hormis les difficultés que nous venons d’évoquer,
choisir
un candidat parce qu’il a obtenu les meilleurs résultats en
exposition constitue une vision limitée des possibilités offertes par
la sélection :
•
les qualificatifs,
les titres et les récompenses ne sont attribués que sur l’appréciation du phénotype et de l’état
général du chien le jour du jugement ;
•
de même, de petites
divergences dans les objectifs de chacun, et les évolutions successives apportées aux standards des
races, peuvent conduire à des classements parfois
incohérents, en incompatibilité avec une sélection rigoureuse.
Observation de la descendance
Pour être réellement efficace, la démarche d’évaluation
de la
valeur génétique d’un chien doit s’appuyer sur l’observation
de
toutes les informations disponibles.
« Pourquoi s’abstenir
d’une sélection sur la descendance lorsque l’on dispose déjà des données suffisantes ?
»
Effectivement,
il convient d’observer l’ensemble des
résultats
obtenus par les différents produits d’un candidat, lorsqu’ils
existent bien entendu, afin de confirmer l’importance de sa
valeur
génétique par rapport à l’ensemble de la population,
ainsi que sa
capacité à transmettre cette valeur génétique.
Il est bien évident que cette observation doit tenir compte
de tous
les produits connus, et en particulier de l’importance de
leur
proportion par rapport à l’ensemble des produits issus d’un
même
candidat, connus ou actuellement non encore observés :
•
il ne suffit pas de
se contenter d’une proportion de produits conformes aux critères de sélection que l’on s’est
donnés ;
•
il faut également
que cette proportion soit significative par rapport à l’ensemble de la production du candidat retenu.
Ainsi,
un étalon dont on dit qu’il a produit 60 % de chiots
conformes aux critères de sélection retenus, alors que l’on
n’a pu
réellement en observer qu’une proportion limitée, 25 % par
exemple, ne peut être d’emblée considéré comme meilleur
qu’un autre, dont la production a pu être contrôlée pour moitié,
même si la proportion de chiots prétendus conformes ne dépasse
pas 30 % : pour l’un comme pour l’autre, seul 15 % de la
production est réellement conforme.
Importance des collatéraux
Bien évidemment, lorsque le candidat n’a pas encore
reproduit,
l’éleveur ne dispose pas de ces informations ; il doit donc
s’appuyer sur celle qu’il possède sur les parents ou plus
généralement l’ascendance, ou les frères et sœurs, et l’ensemble
des collatéraux par extension.
Cependant, l’importance relative de ces informations est
primordiale dans le cadre de la sélection canine. Hormis les
différences liées à la nature même des individus pour
lesquels les
observations ont été réalisées, et à la valeur du
coefficient de
détermination que l’on pourrait estimer, il convient de
tenir
compte de deux difficultés d’origine différentes :
•
la première est
relative à la validité des informations obtenues, les paramètres actuellement retenus comme critères de
sélection n’ayant pas forcément été systématiquement
observés de la même façon, ou avec le même intérêt ;
ainsi, à défaut de s’assurer que les dentitions ont toujours été
observées avec la même attention, dire que dans une lignée
donnée on n’avait jamais observé de manques de dents avant
telle date, ne signifie pas forcément que les reproducteurs
utilisés depuis cette date sont responsables de l’introduction
de ces problèmes dentaires ;
•
la seconde soulève
le problème des contrôles de filiation, des fraudes ou des erreurs commises lors de l’enregistrement des
généalogies ; ainsi, plus on remonte dans l’ascendance d’un
chien, plus on est en droit de remettre en cause l’exactitude
des informations portées sur les pedigrees.
Au delà des situations de déclarations erronées ou
frauduleuses, il convient de rappeler que les dispositions fixant les
obligations réciproques des propriétaires d’étalons et de lices,
dégagées et codifiées par la FCI en
1934 sous le nom de Coutume Internationale d’Elevage de MONACO,
précisaient à l’article 6 que «
lorsque la
chienne aura été saillie par des étalons différents, le certificat de
la saillie mentionnera les différents étalons et les dates
de leur service
».
Ces
dispositions n’ont été remplacées que récemment,
puisque c’est lors de l’Assemblée Générale de la FCI
des 11 et 12 juin 1979 que le texte actuel du Règlement International d’Elevage
de la FCI a
été adopté, précisant à l’article 5 que « de
toutes façons, il est interdit de laisser saillir une lice par deux ou plusieurs
étalons pendant ses mêmes chaleurs
»,
et à l’article 6 « après
une saille non intentionnelle par un étalon autre que celui prévu, il est interdit de
procéder à une nouvelle saillie avec l’étalon qui avait été prévu à cet effet
»
Il parait donc évident qu’il est dans ces conditions
difficile d’accorder une valeur trop importante aux généalogies
officiellement déclarées ; en particulier,
remonter au delà
de huit
générations
pour établir le choix d’un reproducteur ne
nous semble pas nécessaire, loin s’en faut. Pour toutes ces
raisons, génétiques d’abord, techniques ensuite, il convient de
toujours considérer avec une plus grande attention les observations
réalisées sur les collatéraux immédiats, par rapport à
celles que l’on obtient de l’ascendance.
Critères de sélection
Afin d’être pleinement
efficace, la sélection d’un
candidat doit
s’appuyer sur des critères différents de la seule
conformité au
standard qui constitue encore actuellement la base parfois
exclusive de la sélection canine ; la conformité au standard
ne
constitue, bien évidemment, qu’un ensemble de critères de
nature quasi exclusivement esthétique.
Selon les pays considérés, le dépistage de la dysplasie
coxofémorale
est devenu plus ou moins systématique. En France,
l’examen de confirmation ne tient pas compte d’un
éventuel
examen radiographique ; un individu réputé radiologiquement
dysplasique peut donc être confirmé, et à ce titre,
autorisé à
reproduire. Pour des raisons politiques et vraisemblablement financières, la SCC semble
se refuser à envisager la considération d’un examen radiographique préalable à l’examen de
confirmation, pourtant parfaitement compatible avec une
politique d’amélioration de l’élevage canin.
Certains clubs de race ont donc décidé de procéder
différemment, en introduisant les résultats de l’examen radiographique de
dépistage de la dysplasie coxo-fémorale parmi les critères
de progression dans la grille de sélection ou d’aide au
placement des portées produites. Ces dispositions ne constituent bien
entendu que des mesures incitatives, là où dans d’autres pays il s’agit
de mesures impératives.
Il semble également intéressant de favoriser
la mise en
place de programmes de sélection relatifs à d’autres affections
pour lesquelles certaines races sont réputées sensibles…
Bien que de nombreuses races n’aient pas encore trop à
souffrir d’une fertilité déficiente, comme c’est déjà le cas
pour certaines, l’examen de l’aptitude à la reproduction constitue une
voie de sélection qu’il ne faut pas négliger. Bien entendu, au
delà des examens cliniques ou de laboratoires renseignant sur l’aptitude
physiologique à reproduire, c’est la valeur des résultats
obtenus, c’est à dire les performances de l’individu, qui
prévaudra :
•
l’estimation
régulière de la qualité de la semence des étalons permettra d’identifier les géniteurs ayant les meilleures
aptitudes, ceci afin de maintenir un potentiel suffisant pour
l’ensemble de la race ;
•
parallèlement, toute
absence de fécondation devra amener l’éleveur à s’assurer des conditions de la saillie et de
la fertilité de partenaire avant de préconiser un examen individuel (si
rien n’apparaît anormal, une seconde chance sera accordée) ;
Choisi pour
transmettre ses
qualités génétiques
à sa descendance, le
reproducteur doit
évidemment être
capable de
l’engendrer !
•
enfin, la viabilité
des chiots sera prise en considération, sans jamais oublier que si la responsabilité des géniteurs peut
être mise en cause (immaturité, anomalies congénitales), celle
des méthodes d’élevage ne doit pas être systématiquement
écartée (traumatismes, troubles nutritionnels).
Modalités de la sélection
Les programmes de sélection actuellement proposés utilisent
le
principe des seuils de sélection, qu’il s’agisse d’exposition
de
conformité au standard ou d’examens complémentaires
(dysplasie, carte dentaire, …).
Il s’agit d’une méthode de sélection certes facile à
mettre en
oeuvre, mais qui à pour inconvénient majeur de
systématiquement écarter de la reproduction des candidats
dont
la valeur génétique moyenne est sûrement tout à fait
satisfaisante, mais qui ne peuvent satisfaire les conditions
requises pour l’un ou l’autre des critères de sélection
choisis.
La mise en place
de critères de sélection excessivement
sévère
conduit généralement à un appauvrissement de la
variabilité
génétique moyenne, et à une diminution du progrès
génétique
réalisable. Quels que soient les objectifs de sélection que
l’on
pourrait définir pour une race, il semble indispensable de
sensibiliser les éleveurs à ce problème.
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