La
sélection phénotypique est
encore appelée individuelle ou massale :
•
individuelle, car on ne s’intéresse qu’à l’individu lui-même,
et absolument pas à ses ancêtres ou ses
descendants ;
•
massale parce que, dans un lot de chiens, on ne retient que les meilleurs.
Concrètement,
la sélection phénotypique débute en France par la confirmation
et se poursuit par les expositions où, selon ses qualités,
le chien acquiert un certain nombre de titres.
Objectifs et
critères de sélection
L’appréciation
des critères de sélection repose principalement sur la
définition d’un modèle, d’une description détaillée et ordonnée
de la race : le standard.
Le
standard doit permettre d’identifier une
race, et de la distinguer des races voisines, d’en
vérifier les aptitudes, d’en saisir le
comportement. Il mentionne les qualités et les défauts que
l’on peut trouver dans la race. Habituellement flou et approximatif en
élevage de rente, le standard vise en fait à
permettre la diagnose, la reconnaissance d’une
race : il est donc large pour permettre d’y englober le maximum
d’individus. On y conserve les qualités essentielles de production,
on « flotte » davantage sur les caractères descriptifs.
La sélection
se fonde alors principalement sur les performances et les
aptitudes. Néanmoins, on tient parfois compte du modèle, dans la
mesure où il existe des corrélations entre celui-ci et les aptitudes,
ou plus simplement pour éviter de déconcerter l’amateur
par une trop grande hétérogénéité.
En
élevage canin, et d’une manière plus
générale en élevage d’animaux de compagnie,
il y a inversion de la hiérarchie des facteurs
économiques et descriptifs : ce qui prime, c’est l’aspect de
l’animal, parfois sans autre justification, souvent parce que l’on
pense qu’il est associé aux qualités d’usage de l’animal. Le
standard devient la matrice idéale de la race : il s’agit
alors d’une description détaillée, précise et
chiffrée, accompagnée parfois de schémas…
Le standard
permet donc à chacun de situer précisément son animal
par rapport à l’idéal. Cependant, on rencontre souvent des ambiguïtés
terminologiques (profondeur de poitrine, épaule droite,
jarret ouvert, angulations…) conduisant à des appréciations
divergentes. L’interprétation du standard donne
souvent lieu à certaines controverses,
évitant parfois une cristallisation sur un
modèle déterminé.
Confirmation
et expositions
La
sélection phénotypique fait appel à
différentes manifestations au cours desquelles
les chiens sont examinés par des juges et expert-confirmateurs
: la qualité phénotypique d’un chien se dévoile
lors de l’examen de la confirmation, et s’affine au cours des
expositions canines, tant régionales que nationales ou internationales.
Confirmation
La
confirmation est réglementée par le décret n° 74-195 du 26 février,
abrogeant le décret 68-709 du 21 septembre 1966 et complétant
les décrets n° 47-681 du 27 mars 1947 et n° 58-8 du 02
janvier 1958.
Cet examen est
obligatoire pour l’enregistrement définitif d’un chien
au LOF et pour l’obtention
du pedigree de tout reproducteur, ainsi que pour l’inscription
au LOF des portées issues
de ce reproducteur.
•
Objectifs
de l’examen de confirmation
L’examen
de confirmation vise théoriquement à assurer le maintien
d’une race, et si possible, son amélioration. Il tend
cependant à délimiter le modèle inférieur, en dessous
duquel on ne devrait pas descendre, et non
le modèle idéal à atteindre, qui relève d’une
sélection plus approfondie. Il convient en effet de faire preuve d’une
certaine indulgence et de ne pas écarter
systématiquement les animaux présentant un défaut.
Certains défauts doivent être considérés comme éliminatoires,
et seuls les chiens porteurs de ce type de défaut devraient
se voir refuser la confirmation par l’expert-confirmateur.
En écartant
systématiquement les chiens présentant un
quelconque défaut, on risquerait de réduire le cheptel
de manière importante, et par la même occasion, son potentiel
génétique. D’où une diminution de la variabilité génétique
avec, tôt ou tard, une tendance à sélectionner des animaux
médiocres : en effet, en l’absence de programme de conservation
spécifique, le système du défaut éliminatoire conduit toujours
à diminuer la variabilité génétique sans gain compensatoire
d’homogénéité. Ainsi, lors de la
confirmation, l’expert-confirmateur devrait écarter
les sujets porteurs de nombreux défauts et les sujets sans qualité,
et, au contraire, primer les sujets porteurs de nombreuses
ou de grandes qualités qu’ils pourront transmettre à leur
descendance.
« Le
sujet parfait n’existe pas : il faut parfois négliger certains
défauts mineurs. »
Ainsi
définie, la confirmation doit aussi permettre
de conserver une base de sélection suffisamment
large. En effet, le maintien d’une variabilité
génétique est indispensable au progrès et permet de
corriger ultérieurement des erreurs qui auraient pu être faites
au cours de la sélection.
•
Confirmation
et sélection
Compte
tenu des objectifs de la confirmation, cet examen permet déjà
d’éliminer les sujets susceptibles de faire baisser le niveau moyen
de la race. De plus, l’examen de confirmation permet un classement
à deux étages :
•
la confirmation accordée à tous les sujets
répondant au standard de la race, et susceptibles
d’entretenir ou d’améliorer les qualités de
celle-ci ;
•
la confirmation « 1er choix » (1), attribuée aux
chiens qui ont des qualités qui peuvent permettre d’améliorer la
race de manière significative, et qui ont de bonnes chances de se
qualifier excellent par la suite. Cette mention peut être attribuée a
posteriori et figurera, dans tous les cas, sur le pedigree et sur
la généalogie des descendants. Le qualificatif « 1er choix » devrait
être considéré comme une approche de sélection, puisque les sujets
ainsi qualifiés seraient susceptibles d’être préférentiellement
choisis comme reproducteurs dans les mois suivants.
•
Contestation
du résultat de l’examen de confirmation
Lorsqu’un
propriétaire estime injustifiée la non-confirmation de son
chien, il lui est possible de faire appel auprès de la SCC
dans un délai de deux
mois à compter du jour de la notification. De
même, si le Club de race estime qu’une confirmation a été accordée
de manière injustifiée, il peut faire appel auprès de la SCC
. Dans tous les cas, le
chien peut être représenté devant un jury d’appel
composé de trois experts. C’est ainsi que près de 50 % des
cas présentés en appel suite à un refus sont repris…
•
Avantages
et inconvénients de l’examen de confirmation
De
nombreuses raisons rendent l’examen de confirmation contestable
dans sa formulation actuelle.
Tout d’abord, si l’examen de confirmation a été instauré, au
départ, pour retirer de la reproduction les individus
jugés inaptes à celle-ci, soit en moyenne 10 à
15 % des inscrits à titre provisoire, force est
de constater que sur l’ensemble des chiens inscrits
au LOF, 30 % à 32 %
seulement sont présentés à la confirmation. L’examen
de confirmation élimine donc, indirectement
certes, des individus tout à fait aptes et beaucoup plus
nombreux. Il s’agit ensuite d’une
évaluation du génotype par le seul phénotype
de l’individu : les risques d’erreur sont évidents. Les experts
ont pour la plupart des connaissances en génétique et en pathologie
insuffisantes pour évaluer l’incidence et la transmissibilité
de tel ou tel défaut.
Enfin, le fait de ne
pouvoir revenir sur une confirmation constitue un
problème important, ceci en rapport avec la seule appréciation phénotypique
du chien. En effet, pourra être accepté à la confirmation
un animal ne présentant aucun défaut majeur, mais porteur
de tares héréditaires qui pourront s’exprimer au niveau de
sa descendance. Un tel reproducteur devrait pouvoir être écarté
du cheptel de la race, or rien n’est prévu dans ce cas. En
revanche, un chien présentant des qualités génétiques
exceptionnelles, pourra être définitivement écarté s’il
présente un défaut phénotypique mineur.
Ainsi,
cet examen, dans sa formulation actuelle, n’est en général que
de peu d’intérêt en matière de sélection : il présente plus
d’inconvénients que d’avantages. Il n’existe d’ailleurs
pas chez la plupart de nos voisins européens.
Cela dit, il ne serait pas sage non plus de
supprimer tout contrôle et de faire n’importe quoi. Il faut,
si on veut faire progresser et évoluer la race, mettre en évidence
ses meilleurs sujets tout en conservant une réserve génétique
suffisante.
Certains
proposent l’adoption d’un système à deux niveaux :
•
un premier où seraient éliminés les chiens présentant de gros
défauts ;
•
un second où il serait tenu compte des aptitudes de l’animal, de
ses qualités de reproducteur et où l’autorisation de
reproduction pourrait alors être retirée en cas de
performances insuffisantes. On pourrait également
compléter le système en hiérarchisant les
reproducteurs en fonction de leurs résultats personnels
et de ceux de leurs descendants.
D’autres proposent un retour à la situation
d’avant 1966 : « remplacer les
certificats de naissance par un pedigree et n’autoriser
la reproduction que d’une partie du
cheptel sur critères de modèle et d’aptitude, avec des exigences
variables et modulables dans le temps ».
Cette solution, plus
proche de l’actuel examen d’aptitude à la reproduction
que l’on retrouve chez nos voisins européens, présente
plusieurs avantages :
•
elle permet d’éliminer certaines ambiguïtés pour des propriétaires
de chiens encore inscrits à titre provisoire au LOF,
en particulier parce que pour nombre d’entre eux, c’est
l’obtention du pedigree qui fait qu’un chien est
reconnu de race, et non simplement le fait d’être
né de parents inscrits, donc de race ;
•
ce système met également l’accent sur les qualités de reproducteur
des sujets confirmés, mettant ainsi en évidence les
premières bases de la sélection…
Expositions
de conformité au standard.
Elles
ont longtemps été qualifiées d’expositions de beauté, puis,
sur décision de la Commission des expositions et du
Comité de la SCC, il a
été décidé, en mars 1984, d’adopter le terme d’exposition
de conformité au standard, qui se veut plus évocateur
du but cynotechnique de ces manifestations. La
notion de conformité au standard se veut plus en accord avec une
idée de sélection sérieuse que la notion de beauté qui exprime
toujours une certaine part de subjectivité. A l’issue
de l’exposition, la valeur d’un chien par rapport au standard
est sanctionnée par l’attribution d’un qualificatif, puis les
meilleurs candidats sont comparés et classés en
fonction de leur valeur respective.
Dans le cadre de la
sélection, il semble important de rappeler le rôle
des instances internationales chargée de coordonner les initiatives
des différents Clubs de race, en uniformisant les critères
d’évaluation et d’interprétation des standards, ainsi que les
systèmes de sélection.
Avec un standard
unique et l’action de telles instances, un chien devrait
être jugé de la même manière dans tous les pays membres.
Cependant, de petites divergences dans les objectifs de chaque
pays peuvent conduire à des classements quelque peu incohérents,
en incompatibilité avec une sélection rigoureuse. Il en
va, malheureusement, généralement de même au niveau national.
Gardons également à l’esprit que tous les qualificatifs, titres et
récompenses ne sont attribués que sur l’appréciation
du simple phénotype ou de l’état général du
chien le jour du jugement. Ils sont souvent de
nature à satisfaire le simple profane, mais ne peuvent
convaincre totalement l’amateur averti.
Les expositions concourent donc
principalement à promouvoir le chien de race
auprès du grand public (elles offrent la possibilité à chacun
de se faire sa propre opinion, sans connaissance cynophilique
particulière). Leur rôle en matière de sélection reste tout
à fait relatif…
Dans le cadre de l’élevage,
la sélection phénotypique est appliquée pour
mettre en évidence les meilleurs chiens sur le plan de
la conformité au standard. La morphologie est un
caractère suffisamment héritable pour être adaptée
à une sélection sur le phénotype. En effet, il est facile de montrer
que pour les caractères à forte héritabilité, ce type de sélection
est performant et précis. Il présente par ailleurs deux avantages
non négligeables :
•
un coût peu élevé ;
•
une mise en oeuvre relativement simple.
C’est également le
seul moyen d’estimer la valeur d’un chien lorsque
ce dernier n’a pas encore reproduit, et qu’il n’est donc pas
encore possible d’estimer avec précision sa valeur
génotypique.
Au cours de la sélection phénotypique, basée sur l’examen de
confirmation et le résultat des expositions, il est donc
parfaitement souhaitable de rejeter tout hyper-type, et
au contraire de rechercher l’équilibre à la
fois des formes et du caractère.
1) Depuis la rédaction de cette thèse la confirmation "Premier
choix" a été supprimée
|