La mise en évidence d’une maladie d’origine
génétique au sein
d’une population surprend toujours l’éleveur qui n’imaginait
pas
(ou ne voulait pas imaginer) que son élevage puisse
être affecté.
Le diagnostic intervient généralement dans un contexte
délicat : en effet, les aspect économiques et affectifs sont ici
plus
qu’ailleurs systématiquement imbriqués.
Établir le diagnostic
Les races de chiens atteintes
de maladies héréditaires
ou
congénitales, ainsi que les symptômes et les lésions
qu’ils
développent sont trop nombreuses pour faire l’objet d’une
présentation exhaustive. Chacun pourra librement se
reporter à
des ouvrages spécialisés, et y trouvera toute l’information
nécessaire à l’identification et à l’appréhension
de la pathologie
correspondante.
Recueil des informations
Seules les informations présentant un intérêt
génétique devront
être envisagées. Il est cependant essentiel que la
récolte
d’informations permette d’exclure, au préalable,
les causes de
maladie autres que génétiques (infectieuses ou
toxiques
notamment).
L’objectivité des
données concernant le nombre de
sujets atteints
par la maladie et / ou décédés est fondamentale. La
prévalence
instantanée et la prévalence moyenne seront évaluées
à partir de
l’examen individuel des animaux de l’élevage et des
relevés
établis depuis le début de la maladie. Il est
indispensable de
s’assurer de l’exhaustivité de ces relevés, en
particulier parce que
les données concernant les animaux vendus manquent
souvent.
La collecte des informations sur l’origine et surtout
la carrière des
géniteurs est essentielle pour déterminer le ou les
chiens vecteurs
de la maladie :
•
le pedigree
délivré par la SCC ne
contient aucune information génétique, à l’exception parfois pour la dysplasie
coxo-fémorale. Il servira cependant de fil conducteur pour la recherche de malades dans l’ascendance, même si
celle-ci s’avère souvent décevante ;
•
la
reconstitution de la carrière des reproducteurs (tant les lices que les étalons) permettra de faire un bilan de leur
production ; même si celles qui concernent les animaux vendus font malheureusement souvent défaut, les données relatives
à l’élevage d’origine et l’élevage propriétaire,
aux dates des mises bas, ainsi qu’aux compositions des fratries (tous
âges) seront attentivement relevées.
Pour chaque géniteur, la composition moyenne de fratrie
sera établie, ainsi que le taux de morbidité (proportion d’animaux atteints) et le taux de mortalité. Cette étude de la
descendance permettra aux spécialistes de reconstituer le génotype
des reproducteurs pour les maladies monogéniques (qui ne
dépendent que d’un seul gène), et d’apprécier le degré d’atteinte
pour les maladies polygéniques.
Afin de limiter les erreurs sur les
résultats, les portées devront être autant que possible observées dans leur
intégralité.
La maladie
Généralement,
l’identification de la maladie est
facile. Elle découle
de la confrontation entre les observations faites et la
description
des maladies génétiques, objet de nombreuses
publications
aujourd’hui. Plusieurs cas de figure peuvent être
observés :
•
le cas le plus
fréquent est celui d’une affection connue dans la race touchée présente dans l’élevage. Pourtant, il
impose le respect d’un minimum de prudence. En effet, si les observations correspondent à la maladie, la maladie
correspond-elle en tous points aux observations ? Si
cette affection est rare ou uniquement connue à l’étranger,
est-il envisageable qu’elle soit apparue dans l’élevage ?
•
lorsque la
maladie est inconnue dans la race, mais connue dans une race très voisine, la présomption sera d’autant
plus forte que la race voisine pourra être considérée, en
réalité, comme une simple variété. Parfois, une enquête rapide au
sein de la race permettra de découvrir que le cas étudié n’est
en fait pas le premier ;
•
lorsque la
maladie est inconnue dans la race, mais connue dans plusieurs races différentes, ou lorsque la maladie est
(apparemment) inconnue, une analyse attentive du cheptel sera réalisée sur la base des données
bibliographiques existantes, afin de vérifier si la transmission est
réellement de nature génétique et d’en déterminer le mode (si
possible), en particulier si l’on ne peut identifier la maladie avec
certitude.
Les animaux vecteurs
L’identification des animaux vecteurs repose sur deux
voies
d’investigation distinctes : l’ascendance et la
descendance. L’observation de la descendance repose sur l’identification
de la
répétition des anomalies sur plusieurs portées. On
espère ainsi
situer les responsabilités au sein de chaque couple de
reproducteurs concernés : l’un, l’autre, ou les
deux géniteurs
peuvent être responsables. Souvent, l’étalon se
comportera
comme un révélateur de l’état génétique des
chiennes. C’est ainsi
que l’on observe une multiplication des cas dans un
élevage, alors
que le cheptel femelle est porteur d’anomalies depuis
déjà
plusieurs années.
Parfois, les chiens malades proviennent de parents
déjà accouplés
sans problème. Cette situation est statistiquement
parfaitement
possible : pour une maladie due à un gène récessif
(situation la
plus fréquente), deux parents porteurs sains ont une
probabilité
de 10 % de n’avoir aucun chiot atteint dans une
portée de huit
chiots, de 24 % dans une portée de cinq ; ces
pourcentages
constituent des minima pour les nombreuses maladies à
pénétrance incomplète.
L’étude de l’ascendance est difficile : elle vise
à repérer les
malades et les porteurs, et à mettre en évidence leur
apparentement. En règle générale, les informations
concernant
les chiens qui ne sont pas issus de l’élevage sont
particulièrement
difficiles à obtenir. En revanche, les lignées
maternelles, souvent
propres à l’élevage, sont généralement bien
suivies, et les
renseignements les concernant, disponibles.
La nature génétique d’une affection et
celle de son déterminisme ne sont connues de façon certaine que pour une minorité de
pathologies, souvent très répandues. En dehors de celles-ci, les incertitudes
persisteront quelle que soit la qualité des investigations mises en oeuvre.
Conduite à tenir
Pour définir une conduite à suivre,
il convient d’évaluer
la gravité
de la situation. Faute d’enquêtes, l’éleveur ne
disposera pour la
majorité des maladies génétiques que d’une
appréciation
qualitative de la situation par race. Pour évaluer
cette situation, il
devra faire appel à la génétique des populations qui
permet de
calculer les proportions relatives d’animaux malades,
porteurs et
génétiquement sains.
L’éradication
Toute politique d’éradication repose sur des
interdictions
graduelles de reproduction. En premier lieu, tout malade
sera
abandonné comme reproducteur. En second lieu, le cas
des
porteurs avérés sera attentivement étudié, puis
celui des porteurs
suspectés. L’importance de l’exclusion en tant que
reproducteur
dépendra de ce que l’éleveur (ou la race) peut
supporter. Si des
porteurs devaient être conservés pour ne pas trop
affaiblir le
cheptel, ils devront être, en compensation,
irréprochables en
regard du standard de leur race. Par ailleurs, leur
progéniture
sera l’objet d’une surveillance attentive, en
particulier s’ils
devaient sortir de l’élevage.
Sur cette base générale, il sera tenu compte du
déterminisme
génétique de la pathologie :
•
pour une
maladie monogénétique récessive, les parents des malades seront retirés de la reproduction, en priorité
; si les frères et soeurs ne sont pas écartés, il devront
faire l’objet d’un testage (au moins pour les étalons) ;
•
pour une
maladie monogénétique dominante, le parent vecteur de l’affection (mâle ou femelle) sera exclut de la
reproduction s’il a pu être identifié ; à défaut, les deux
parents seront exclus. Les frères et soeurs apparemment sains feront l’objet
des mêmes précautions que dans le cas précédent ; en
effet, si la maladie est dominante, la pénétrance (c’est à dire
son expression) est très souvent incomplète ;
•
pour une
maladie polygénique, seuls les sujets malades et les plus atteints pourront être retirés de la reproduction
; le niveau d’exigence dépendra de l’état de la situation et
ne pourra être augmenté qu’à la condition qu’il s’accompagne d’une
amélioration sensible.
La prévention
La prévention est règle d’or en élevage :
elle se
conçoit en
élevage atteint comme en élevage sain.
L’utilisation d’un reproducteur malade ou
soupçonné de l’être,
devra être proscrite, quelles que soient ses qualités
(même
exceptionnelles). Les maladies qui se déclarent
tardivement
poseront donc de nombreuses difficultés, et l’éleveur
devra s’en
remettre aux mêmes mesures que pour un reproducteur
apparemment sain.
La prévention
passe par la connaissance de l’ascendance,
voire de
la descendance. L’observation stricte des principes
énoncés ci-dessous
n’annulera pas le risque, mais le diminuera
considérablement, aussi sera-t-il sage de s’en
rapprocher aussi
souvent que possible :
•
il conviendra
en priorité de s’assurer qu’il n’existe pas d’animaux malades dans les générations
précédentes, en se rappelant qu’au delà de quatre générations
indemnes, le risque que le candidat retenu soit porteur sain est inférieur
à 10 % (pour autant que l’on soit certain de la filiation et
que l’ensemble des frères et soeurs aient été
observés) ;
•
même si la
mise en application de cette règle s’avère quasiment impossible pour un géniteur n’ayant pas
encore reproduit au sein de l’élevage, aucun cas de maladie
ne sera toléré dans la descendance ; autant que possible, les
jeunes reproducteurs seront évalués précocement, en
particulier s’il s’agit de mâles.
Pour les maladies à déterminisme monogénétique
récessif ou polygénique, le « testage » ne sera efficace que si
une partie des femelles supports du testage est porteuse des gènes
délétères.
Dans ce cas, l’absence de descendant malade apportera
la garantie de l’intégrité génétique de l’étalon,
mais les chiots nés de ces accouplements ne pourront être retenu pour la
reproduction : tous seraient sains, ou porteurs sains,
sans qu’aucune distinction ne puisse être faite entre eux
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